sábado, 26 de septiembre de 2009

TRAVESIAS POÉTICAS / / TRAVERSÉES POÉTIQUES Coordinateurs à Paris: Nicole Barrière - Philippe Tancelin - José Muchni

Ciclo de Poesía en Vivo Argentina - Francia
Cycle de Poésie en direct France – Argentine


1era Travesía : Miércoles 16 de septiembre 2009 / 1ère Traversée : Mercredi 16 septembre 2009 (13 hs à Buenos Aires - 18 hs à Paris)

Avec la collaboration de l’Alliance Française de Buenos Aires, le Centre Franco-Argentin (CFA) d’Hautes Etudes de l’Université de Buenos Aires et le Centre Internationale de Creation d’Espace Poétique (CICEP) de l'Université de Paris VIII.

Coordinateurs à Paris: Nicole Barrière - Philippe Tancelin - José Muchnik.

Coordinadores desde Buenos Aires: Alicia Grinbank - José Emilio Tallarico - Luis Raúl Calvo - Ramón Fanelli.

Asistance technique: Alejandro Lopez, Rui Rosa.

Programa / Programme

France:
Hommage / Homenaje : René Char
Poète invitée / Poeta invitada: Claude Ber

Argentina:

Homenaje / Hommage : Roberto Juarroz
Poeta invitado / Poète invité : Juan García Gayo
Música / Musique : Enrique Patet (bandoneón)




ROBERTO JUARROZ

11 Poesía Vertical
11 ème Poésie Vertical

(TRADUCIDOS AL FRANCÉS POR FERNAND VERHESEN)

Una escritura que soporte la intemperie,
que se pueda leer bajo el sol o la lluvia,
bajo el grito o la noche,
bajo el tiempo desnudo.

Una escritura que soporte lo infinito,
las grietas que se reparten como el polen,
la lectura sin piedad de los dioses,
la lectura iletrada del desierto.

Una escritura que resista
la intemperie total.
Una escritura que se pueda leer
hasta en la muerte.
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Une écriture qui supporte l'intempérie,
qui puisse se lire sous le soleil ou la pluie,
sous la nuit ou le cri,
sous le temps dénudé .

Une écriture qui supporte l'infini,
les crevasses qui s'étoilent comme le pollen,
la lecture sans pitié des dieux,
la lecture illettrée du désert .

Une écriture qui résiste
à l'intempérie totale .
Une écriture qui puisse se lire
jusque dans la mort .



Llaman a la puerta.

Pero los golpes suenan al revés,
como si alguien golpeara desde adentro.

¿Acaso seré yo quien llama?
¿Quizá los golpes desde adentro
quieran atrapar a los de afuera?
¿O tal vez la puerta misma
ha aprendido a ser el golpe
para abolir las diferencias?

Lo que importa es que ya no se distingue
entre llamar desde un lado
y llamar desde el otro.

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On frappe à la porte .
Mais les coups résonnent au revers,
comme si quelqu'un frappait de l'intérieur .

Serait-ce moi qui frappe ?
Peut-être les coups de l'intérieur
veulent-ils couvrir ceux de l'extérieur ?
Ou bien la porte elle-même
a-t-elle appris à être le coup
pour abolir les différences ?

Ce qui importe est que l'on ne distingue plus
entre frapper d'un côté
et frapper de l'autre .

Una invasión de palabras
trata de acorralar al silencio,
pero, como siempre, fracasa.

Intenta luego arrinconar a las cosas
que habitan el silencio,
pero tampoco lo consigue.
Y va por fin a cercar a las palabras
que conviven con el silencio,
pero entonces se produce lo imprevisto:
el silencio se convierte en palabra
para proteger mejor a las palabras
que conviven con él.

Y mientras la invasión de las otras palabras
se desvanece como un soplo furtivo,
se completa lo insólito:
las palabras que quedan
se asemejan ahora mucho más al silencio
que a las otras palabras.
(para René Char)


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Une invasion de paroles
tente d'assiéger le silence,
mais, comme toujours, échoue .

Elle essaie alors de coincer les choses
qui habitent le silence,
mais n'y arrive pas davantage .
Elle va finalement encercler les paroles
qui cohabitent.avec le silence,
alors se produit l'imprévu :
le silence se convertit en paroles
pour mieux protéger les paroles
qui cohabitent avec lui .

Et pendant que l'invasion des autres paroles
se dissipe comme un souffle furtif,
l'insolite s'accomplit :
les paroles qui restent
ressemblent alors beaucoup plus au silence
qu'aux autres paroles .
(pour René Char)

1era Poesía Vertical
Première Poésie Verticale.
Traduit de l’espagnol (argentin) par Roger Munier, © Fayard, 1980

Pienso que en este momento
tal vez nadie en el universo piensa en mí,
que sólo yo me pienso,
y si ahora muriese,
nadie, ni yo, me pensaría.

Y aquí empieza el abismo,
como cuando me duermo.
Soy mi propio sostén y me lo quito.
Contribuyo a tapizar de ausencia todo.

Tal vez sea por esto
que pensar en un hombre
se parece a salvarlo.
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Je pense qu’en ce moment
personne peut-être ne pense à moi dans l’univers,
que moi seul je me pense,
et si maintenant je mourais,
personne, ni moi, ne me penserait.
Et ici commence l’abîme,
comme lorsque je m’endors.
Je suis mon propre soutien et me l’ôte.
Je contribue à tapisser d’absence toutes choses.
C’est pour cela peut-être
que penser à un homme
revient à le sauver.


René Char

Traducción : Gustavo Aguirre (1968), Javier Zugarrondo (1998), José Muchnik (2008)



J’habite une douleur
Le poème pulvérisé / El poema pulverizado (1945-1947)

Ne laisse pas le soin de gouverner ton coeur à ces tendresses parentes de l'automne auquel elles empruntent sa placide allure et son affable agonie. L'oeil est précoce à se plisser. La souffrance connaît peu de mots. Préfère te coucher sans fardeau: tu rêveras du lendemain et ton lit te sera léger. Tu rêveras que ta maison n'a plus de vitres. Tu es impatient de t'unir au vent, au vent qui parcourt une année en une nuit. D'autres chanteront l'incorporation mélodieuse, les chairs qui ne personnifient plus que la sorcellerie du sablier. Tu condamneras la gratitude qui se répète. Plus tard, on t'identifiera à quelque géant désagrégé, seigneur de l'impossible.

Pourtant.

Tu n'as fait qu'augmenter le poids de ta nuit. Tu es retourné à la pêche aux murailles, à la canicule sans été. Tu es furieux contre ton amour au centre d'une entente qui s'affole. Songe à la maison parfaite que tu ne verras jamais monter. A quand la récolte de l'abîme? Mais tu as crevé les yeux du lion. Tu crois voir passer la beauté au-dessus des lavandes noires...

Qu'est-ce qui t'a hissé, une fois encore, un peu plus haut, sans te convaincre?

Il n'y a pas de siège pur.


Yo habito un dolor

No dejes el cuidado de gobernar tu corazón a esas ternuras parientas del otoño del que ellas toman su plácido aspecto y su afable agonía. El ojo es precoz para plegarse. En sufrimiento conoce pocas palabras. Prefiere acostarse sin carga: soñarás con el mañana y tu lecho te será leve. Soñarás que tu casa ya no tiene vidrios. Estás impaciente por unirte al viento, al viento que recorre un año en una noche. Otros cantarán la incorporación melodiosa, las carnes que sólo personifican la hechicería del reloj de arena. Condenarás la gratitud que se repite. Más tarde, te identificarás con algún gigante disgregado, señor de lo imposible.

Sin embargo.

No has hecho más que aumentar el peso de tu noche. Has vuelto a la pesca en las murallas, a la canícula sin verano. Estás furioso contra tu amor en el centro de una comprensión que enloquece. Piensa en la casa perfecta que nunca verás elevarse. ¿Para cuándo la cosecha del abismo? Pero has vaciado los ojos del león. Crees ver pasar la belleza por encima de las lavandas negras.

¿Qué es lo que te ha izado, una vez más, un poco más arriba sin convencerte?

No hay sitio puro.





Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud!

Fureur et mystère, 1962 / Furor y misterio


Tes dix-huit ans réfractaires à l'amitié, à la malveillance, à la sottise des poètes de Paris ainsi qu'au ronronnement d'abeille stérile de ta famille ardennaise un peu folle, tu as bien fait de les éparpiller aux vents du large, de les jeter sous le couteau de leur précoce guillotine. Tu as eu raison d'abandonner le boulevard des paresseux, les estaminets des pisse-lyres, pour l'enfer des bêtes, pour le commerce des rusés et le bonjour des simples.


Cet élan absurde du corps et de l'âme, ce boulet de canon qui atteint sa cible en la faisant éclater, oui, c'est bien là la vie d'un homme! On ne peut pas, au sortir de l'enfance, indéfiniment étrangler son prochain. Si les volcans changent peu de place, leur lave parcourt le grand vide du monde et lui apporte des vertus qui chantent dans ses plaies.

Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud! Nous sommes quelques-uns à croire sans preuve le bonheur possible avec toi.

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¡Hiciste bien en partir, Arthur Rimbaud !

Tus dieciocho años refractarios a la amistad, a la malevolencia, a la necedad de los poetas de Paris como al ronroneo de abeja estéril de tu familia ardenesa un poco loca, hiciste bien en desparramarlos a los vientos de alta mar, en arrojarlos bajo el filo de de su precoz guillotina. Tuviste razón en cambiar el bulevar de los perezosos, los cafetines de los poetastros, por el infierno de las animales, por el comercio des los astutos y el buen día de los simples.

¡Ese ímpetu absurdo del cuerpo y del alma, esa bala de cañón que alcanza su blanco haciéndolo estallar, claro que sí, eso es la vida de un hombre! No se puede al salir de la infancia, estrangular indefinidamente al prójimo. Si bien los volcanes cambian poco de lugar, su lava recorre el gran vacío del mundo y le otorga virtudes que cantan en sus playas.

¡Hiciste bien en partir, Arthur Rimbaud ! Somos unos cuantos los que creemos sin pruebas la felicidad posible contigo.



Pour renouer

Nous nous sommes soudain trop approchés de quelque chose dont on nous tenait à une distance mystérieusement favorable et mesurée. Depuis lors, c’est le rongement. Notre appui-tête a disparu.
Il est insupportable de se sentir part solidaire et impuissante d’une beauté entrain de mourir par la faute d’autrui. Solidaire dans sa poitrine et impuissant dans le mouvement de son esprit.
Si ce que je te montre et ce que je te donne te semble moindres que ce que je te cache, ma balance est pauvre, ma glane est sans vertu.
Tu es reposoir d’obscurité sur ma face trop offerte, poème. Ma splendeur et ma souffrance se sont glissées entre les deux.
Jeter bas l’existence laidement accumulée et retrouver le regard qui l’aima assez à son début pour en étaler le fondement. Ce qui me reste à vivre est dans cet assaut, dans ce frisson.

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Para reanudar

Súbitamente nos hemos acercado demasiado a algo de lo que nos mantenían a una distancia misteriosamente favorable y medida. Desde entonces, es el remordimiento. Nuestro reposacabezas ha desaparecido.

Es insoportable sentirse parte solidaria e impotente de una belleza muriendo por la culpa del otro. Solidaria en su pecho e impotente en el movimiento de su espíritu.

Si lo que te muestro y te doy te parecen menores de lo que te oculto, mi balanza es pobre, mi cosecha carece de virtud.

Tú eres estada de obscuridad sobre mi cara demasiado ofrecida, poema. Mi esplendor y mi sufrimiento se han deslizado entre los dos.

Derribar la existencia horriblemente acumulada y reencontrar la mirada que tanto lo amó al comienzo. Lo que me queda para vivir está en este asalto, en este estremecimiento.


Les dentelles de Montmirail

Au sommet du mont, parmi les cailloux, les trompettes de terre cuite des hommes des vieilles gelées blanches pépiaient comme des petits aigles.
Pour une douleur drue, s’il y a douleur.
La poésie vit d’insomnie perpétuelle.
Il semble que ce soit le ciel qui ait le dernier mot.
Mais il le prononce à voix si basse que nul ne l’entend jamais.
Il n’y a pas de repli ; seulement une patience millénaire sur laquelle nous sommes appuyés.
Dormez désespérés, c’est bientôt jour, un jour d’hiver.
Nous n’avons qu’une ressource avec la mort : faire de l’art avant elle.
La réalité ne peut être franchie que soulevée.
Aux époques de détresse et d’improvisation, quelques-uns ne sont tués que pour une nuit et les autres pour l’éternité : un chant d’alouette des entrailles.
La quête d’un frère signifie presque toujours la recherche d’un être, notre égal, à qui nous désirons offrir des transcendances dont nous finissons à peine de dégauchir les signes.
Le probe tombeau : un meule de blé. Le grain au pain, la paille pour le fumier.
Ne regardez qu’une fois la vague jeter l’ancre dans la mer.
L’imaginaire n’est pas pur ; il ne fait qu’aller.
Les grands ne se perpétuent que par les grands. On oublie. La mesure seule est blessée.
Qu’est-ce qu’un nageur qui ne saurait se glisser entièrement sous les eaux ?
Avec des poings pour frapper, ils firent de pauvres mains pour travailler.
Les pluies sauvages favorisent les passants profonds.
L’essentiel est ce qui nous escorte, en temps voulu, en allongeant la route. C‘est aussi une lampe sans regard, dans la fumée.
L’écriture d’un bleu fanal, pressée, dentelée, intrépide, du Ventoux alors enfant qu’à tout moment notre amour m’emportait, m’enlevait.
Des débris de rois d’une inexpugnable férocité.
Les nuages ont des desseins aussi fermés que ceux des hommes.
Ce n’est pas l’estomac qui réclame la soupe bien chaude, c’est le cœur.
Sommeil sur la plaie pareil à du sel.
Une ingérence innommable a ôté aux choses, aux circonstances, aux êtres, leur hasard d’auréole. Il n’y a d’avènement pour nous à partir de cette auréole. Elle n’immunise pas.
Cette neige, nous l’aimions, elle n’avait pas de chemin, elle découvrait notre faim.

Los encajes de Montmirail

En la cima del monte, entre los guijarros, las trompetas de tierra cocida de los hombres de las viejas heladas piaban como aguiluchos.

Por un dolor recio, si dolor hay

La poesía vive de insomnio perpetuo

Parece que es el cielo quien tiene la última palabra. Pero la pronuncia tan quedo que nadie la oye nunca

No hay repliegue, tan sólo una paciencia milenaria sobre la cual nos hemos apoyado.

Dormid desesperados, pronto vendrá el día, un día de invierno.

Sólo tenemos un recurso con la muerte, hacer arte antes que ella

La realidad no puede ser salvada sino sublevándola.

En época de penuria y de improvisación, a algunos se les quita la vida por una noche, a otros por la eternidad : un canto de alondras de las entrañas.

La busca de un hermano significa casi siempre la búsqueda de un ser, nuestro igual, a quien deseamos ofrecer trascendencias cuyos signos apenas terminamos de enderezar.

Tumba proba : una hacina de trigo. El grano al pan, la paja al estiércol.

Mirad una sola vez la ola echar el ancla en el mar

Lo imaginario no es puro, no hace más que pasar.

Los grandes se perpetúan sólo por los grandes. Olvidamos. Sólo la medida resulta herida.

¿Qué nadador es ése que no sabe deslizarse enteramente bajo las aguas ?

Con puños para golpear hicieron pobres manos para trabajar.

Las lluvias salvajes favorecen a los caminantes profundos

Lo esencial es lo que nos escolta, en tiempo debido, alargando el camino. Es también una lámpara sin mirada, en la humareda.

La escritura de un azul faro, apresurada, dentada, intrépida, del Ventoux de mi niñez, a cada momento nuestro amor me arrancaba, me llevaba.

Vestigios de reyes de inexpugnable ferocidad

Las nubes tienen intenciones tan cerradas como los hombres.

No es el estómago quien reclama la sopa bien caliente, es el corazón

Sueño sobre la llaga semejante a sal.

Una ingerencia innominable ha quitado a las cosas, a las circunstancias, a los seres, su azar aureolado. No hay advenimiento para nosotros que surja de esta aureola. Ella no inmuniza.

Esta nieve, la amábamos, no tenía camino, descubría nuestra hambre.


Aphorismes / Aforismos

163 Chante ta soif irisée.
Canta tu sed irisada

165 Le fruit est aveugle. C’est l’arbre qui voit
El fruto es ciego. Es el árbol que ve.

169 La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil.
La lucidez es la herida más cercana al sol

188:Entre le monde de la réalité et moi, il n'y a plus aujourd'hui d'épaisseur triste
Entre el mundo de la realidad y yo, hoy ya no hay espesor triste

200 C'est quand tu es ivre de chagrin que tu n'as plus du chagrin que le cristal

Es cuando estás ebrio de pena cuando ya no tienes más pena que el cristal.



JUAN GARCÍA GAYO
TRADUCCION AL FRANCÉS DE ALICIA GRINBANK


I

La mesa de mi cocina es muy pequeña
pero para la mosca que revolotea a mi alrededor es enorme.
Mi mesa es de madera maciza
pero un neutrino puede atravesarla fácilmente sin dejar rastros.
Vista desde el espacio sideral gira,
como todo en la Tierra, a miles de kilómetros por hora.
Si mi mesa de cinco kilos estuviera en la Luna
pesaría solamente dos kilos
y si llegara al campo de una estrella de gran intensidad
pesaría cien mil.
Mi mesa está pintada de blanco (yo mismo la desfiguré)
pero de noche es azul ultramar
y cuando apago la luz desaparece.
Mi mesa se alegra con las conversaciones,
le disgustan la radio y la televisión,
no quiere que esté solo
y prefiere las manchas de vino
a una esponja embebida con detergente.
No sé si sabe algo acerca del Universo,
de la física quántica, del recalentamiento de la atmósfera,
pero cuando la miro tiernamente,
en un bello lugar del mundo
dos hermanos que se habían jurado odio eterno
se abrazan.
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La table de ma cuisine est très petite
mais pour la mouche qui voltige autour de moi est énorme.
Ma table est en bois massif
mais un neutrino peut facilement la traverser sans laisser de traces.
Vue depuis l'espace sidéral elle tourne,
comme tout dans la Terre, à milliers de kilomètres à l’ heure.
Si ma table de cinq kilos était dans la Lune
elle pèserait seulement deux kilos
et si elle arrivait au champ d'une étoile de grande intensité
pèserait cent mille.
Ma table est peinte de blanc (moi même l'ai défigurée)
mais la nuit elle est bleu outre-mer
et quand j'éteins la lumière elle disparaît.
Ma table se réjouit avec les conversations,
la radio et la télévision lui déplaisent,
elle ne veut pas que je sois seul
et préfère les taches de vin
à une éponge imbibée avec détergent.
Je ne sais pas si elle sait quelque chose à propos de l'Univers,
de la physique quantique, du réchauffement de l'atmosphère,
mais quand je la regarde tendrement,
dans un beau lieu du monde
deux frères qui s’étaient juré haine éternelle
s’ embrassent.


II
De repente deslizan bajo la puerta
una carta con amenazas
o estallan las cañerías o los cimientos crujen
o anuncian la desgracia de un amigo
o me asalta el recuerdo de aquel día
cuando te sorprendí llorando
y nunca me dijiste por qué

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Tout à coup on glisse sous la porte
une lettre avec des menaces
ou éclatent les tuyaux ou craquent les fondations
ou on annonce le malheur d'un ami
ou m'assaille le souvenir de ce jour
quand je t'ai surpris en pleurant
et tu ne m'as jamais dit pourquoi.



III
Antes de poner la llave a la puerta de mi casa dorada
me asomo para ver el jardín
y comprobar que su perfume no ha cambiado.
Hago el balance de la abeja:
todo lo que no entiendo es miel

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Avant de mettre la clé à la porte de ma maison dorée
je me penche pour voir le jardin
et pour vérifier que son parfum n'a pas changé.
Je fais le bilan de l’ abeille :
tout ce que je n' comprends pas c’est miel

IV
Volveremos volvimos
a nuestro balconcito del Savoia & Jolanda

El agua empujó toda la noche fichas de jade
hasta que el campanario de Saint Giorgio se hizo
revelación
Niebla vientre de escamas sobre la piel
Y esto pudimos confirmar:
Venecia vive
Seremos siempre jóvenes
El tren sale mañana a las 8 menos 20

Al pasar en el barco cerca del cementerio dijiste:
Quisiera que me enterraran aquí


Nous reviendrons nous sommes revenus
à notre petit balcon du Savoia & Jolanda

L´eau a poussé pendant toute la nuit des morceaux de jade
Jusqu’ à l’ instant où le clocher de Saint Giorgio se fit
révélation
Brouillard ventre d’ écailles sur la peau
Et nous avons pu confirmer cela:
Venise vit
Nous serons toujours jeunes
Le train part demain à 8 heures moins 20

En passant dans le bateau près du cimetière tu as dit:
Je voudrais qu’ on m’ enterre ici

Claude Ber

Ce qui reste
(Traduction à l’espagnol : Carlos Henderson)

Ce qui reste parfois je l'appelle poème
car toujours le poème n'est que
ce qui reste une fois que
après que
avant que
ou alors il ne reste rien
ce qui reste de mémoire dans le corps et ce qui reste de mots pour dire une fois tu
l'emballement des mots qui s'écoutent
- peut-être par défaut mais c'est le mot qui me restecomme
d'ici où j'écris sans savoir ce qui va rester ou même s'il va rester
comme
par exemple quand une fois déserté et déshabité - enfin - le nom
il ne reste que
ce qui reste de la soustraction
- quand écrire est soustraire et par ce retrait saisirce
peut être
parfois
ce qui reste de la poésie
Quant à ce qui reste du poème ou s'il en reste, il m'arrive de m'en inquiéter comme d'une
parole de ma mort tout en sachant qu'elles sont indifférentes cette parole et ma mort. Je m'en
inquiète par sursauts du corps et de la conscience, mais jamais autrement. Sinon la colère
m'envahit comme si me menaçait cette asphyxie que provoquent les systèmes avec leurs
orthodoxies et leur anathèmes. Cela est sans doute injuste, mais tant pis. J'ai préféré les
mystiques aux dévots et le silence aux dogmes. Si bien que je profère peu de paroles que je ne
rature aussitôt après jusqu'à ce qu'il n'en reste rien ou presque rien. Cette lacération de
beaucoup de ce que je dirais et cette douleur c'est ce qui reste de mon histoire avec la
philosophie. Quelques fragments des cahiers de Wittgenstein et la définition spinoziste du
bien comme augmentation dans l'être et du mal comme diminution dans l'être,
c'est ce qui reste
avec le poème
avec le poème surtout
comme un essai très difficile très prudent de réconciliation
tant je redoute ce qui se dit de et ce qui se dit sur
comme un essai de parole
qui cesse de
et cette cessation
ce qui reste une fois que cesse la tyrannie de la parole
je l'appelle poème
De toute façon ce qui reste, je l'entends ceux qui restent
écoutant ta mort dans les mots
qui ôte parole à la parole
et ce qui reste quand on est de ceux qui restent et soi-même ce qui reste
est tellement rien de la parole
absence de langue dans cette absence qu'est déjà la langue
trou dans un trou
que
les mots disant ce vide et cette absence les comble
comme
les pelletées de terre comblent la tombe
et les mots qui restent emplissent ma bouche
comme
la terre emplit la tienne
Ce qui reste de toi
par exemple tes pieds devenus rigides
que l'on n'avait pas pu faire entrer dans tes chaussures
je revois ces chaussures mal mises
et cela me travaille
de n'avoir pu remettre tes chaussures mal mises
comme
si tu avais à marcher
comme
si tu marchais
mais tes bras et tes mains étaient chauds et souples même deux jours après
et je les ai placés
comme
tu le souhaitais
voilà ce qui reste dans ma mémoire
dont il ne restera rien
Ce qui reste, c'est parfois trop
trop muet et trop prolixe pour une bouche
ce n'est pas le silence qui reste c'est le mutisme
et le ciel parcourt le ciel
immobilement
Ce qui reste des morts
c'est aussi le ménage des morts
après la mort solitaire du père j'ai fait le ménage
les vêtements le linge la vaisselle les papiers les objets
on trie on jette on donne on prend on range
ce ménage de la mort je l'ai fait ensuite pour des morts familiaux plus lointains: pareil le linge,
les vêtements, les meubles et même pour une très vieille morte par surprise en plein mois de
juillet d'une crise cardiaque et emportée deux jours après par les pompiers, le ménage des
premiers vers: de gros vers blancs qui courraient sur le carreau à l'emplacement du corps
et pareil le linge, la vaisselle, les meubles, les papiers
et maintenant le ménage de toi
celui- là impensable
et pareil ce qui restait de toi et de toute ta, nôtre...
le linge les habits les papiers les livres
un an entier a duré
ce ménage de ta mort
vidant sac par sac
moi aussi vidée
sac par sac
et maintenant qu'il faudrait vendre la maison où ont échoué ces restes des morts et que je vide
tout c'est
comme
s'il fallait que je me charge du ménage de ma propre mort
Des poèmes aussi
restent de toi
et je pense triomphante: une fois fait le ménage des morts, le poème c'est ce qui reste à ceux
qui restent
et je classes des fragments et débris de poèmes dans de vieilles chemises froissées, des tiens,
des miens
je relis les phrases raturées encore lisibles
- c'est pour effacer, vraiment effacer toute trace et qu'il ne reste rien que toi comme moi les
surchargeons de noir épais et c'est aussi pour qu'il ne reste rien que j'écris le plus possible
directement sur ordinateur, plus de ratures, plus de traces, plus rien la mort lisse l'illusion
d'éternité intacte
enfin rienmais
ce qui reste, ces bribes de textes inaccomplis et même les accomplis, ces restes je les
rassemble
comme
recueillant des restes mortuaires
et ce qui pouvait être émouvant, les traces de ce que nous sommes, ou festif, celles de ces
restes sur la table des anniversaires ou dans les draps des célébrations intimes, tout cela
sombre avec le reste
et ce qui reste c'est la mort
Dans ce qui reste, j'entends ceux qui restent
et moi restant à l'inventaire de ce qui reste de toi de nous, mémoire gibecière prolifique
même si pleine d'oiseaux tués
il reste il reste il reste tant que
que je voudrais dire tout ce qui reste sortant de ma bouche des brassées de rubans de
colombes de lièvres de tisons de foulards
en quantité inimagineable
c'est incroyable ce qui reste d'une vie
cette immensité dans la mémoire
et je voudrais dire
toute cette immensité soustraite
il faut que je dise toute cette et puis non
la mort fait des mots une obscénité
ce qui reste n'appartient qu'à moi qui appartiens pour mi part à la mort
et ce qui reste de ma vie à ce jour c'est ta mort
J'entends ceux qui restent
dont je fais partie
pourtant c'est toi qui reste à cette date où tu finis ta vie et y demeure définitivement
alors que je continue d'avancer vers la mort et qu'il me reste à parcourir la distance inconnue
entre ta mort et la mienne
et ta mort me fait vivre à reculons allant te rejoindre alors que tu demeures d'où je continue
et je vais vers la mort en arrière
et ce qui me reste de vie est pris entre deux morts
J'entends ceux qui restent
et je n'entends plus rien
Ce qui reste de toi
je ne peux pas l'imaginer
pas imaginer ton visage, tes yeux ta bouche sans leur chair ou ta chair pourrissante ou tes
yeux - tes yeux d'un regard extrême et inépuisable- avec les pupilles crevées par les gaz de la
fermentation
je sais, peux voir même
mais je n'entends pas
je n'entends pas ces mots là
ils sonnent blancs
je ne les comprends pas
ce sont des mots écrits mais d'impossibles paroles
J'entends ceux qui reste dans ce qui reste et dans ce labour du vers qui retourne mes mots
j'entends soudain vers
comme
vers de cadavre
où bien je lis dépouille et le mot fait défaut
jusqu'à
n'être plus qu'une dépouille sonore et j'entends des pouilles ou dé pou yeux ou
jusqu'où
la langue part en lambeaux
jusqu'à
ce que je ne comprenne plus ce dont je parle comme
dans cette difficulté que j'ai à dire "tu n'es plus"
onestmortouvivantmaisonestencorequelquechosen'être
plusc'estnepasêtreêtremortc'estêtremortetn'êtreplusvivantouimaissiêtremortc'estn'êtreplusriena
lorsn'êtreplusveutbiendireetplusrienneveutriendireetsurtoutpasvouloiret
et comme ça des heures durant
et ces bruissements sous les mots qui les effritent c'est aussi ta mort
Mais pour toi
parce que plus solitaire en mort que moi ici avec pas même comme moi pleurs et chagrin
avec rien
ou alors où et avec quoi toi?
ce jour de printemps pluvieux à la lisière du Bois de Boulogne avec les pigeons et les fleurs
mauves des treffles
tu te souviens de ce tréma sur le Bienvenüe de Montparnasse qui a isolé pour nous le mot
entier
nous accueillant
et de mes treffles à quatre que tu nommais herbe à lapin
ces treffles sous leur enveloppe de scotch je te les donne
au cas où demeurerait monnaie de notre âme
comme
glisse entre mes doigts cette menue monnaie d'un bonheur mort
pour toi
à qui ne reste rien en mort
et même pas savoir et sentir de la mort
ou alors mais cet alors est trop démesuré pour un tissu d'âme élimé par la peine
pour toi parce que sans yeux t'offrant ce que mes yeux voient sous la pluie fine qui nettoie
l'horizon cette maison sur les hauteurs du port semblable à celle que nous aurions habitée
comme
une parole ou un geste amoureux
comme
nous aurions regardé ensemble ce ciel pervenche du sud sur la mer grise
et les aurions trouvés beaux dans leur présent
sans en espérer plus
et l'air frais qui fait légèrement frissonner les épaules
dans l'odeur des eucalyptus et de l'iode
il n'y a pas de preuve
mais la peau n'en a pas besoin
ni les nuages dans le jaune de l'aube
de la mer séparée
ne reste plus qu' une ligne au bout bombé du ciel
de toi à moi
cette ligne qui va sombrer

Lo que queda


A veces a lo que queda lo llamo poema
puesto que el poema no siempre es lo que
queda una vez que
después que
antes que
o no queda nada
lo que queda de recuerdos en el cuerpo y lo que
queda de palabras para decir una vez tu entusiasmo
por las palabras que se escuchan
--quizá en rebeldía pero es la palabra lo que me queda—
como
aquí cuando escribo sin saber lo que va a quedar o incluso si quedará
como
por ejemplo cuando una vez abandonada y desierta
--en fin-- el nombre
no queda pero
lo que queda de la sustracción
--cuando escribir es sustraer y por esa contracción asir—
es quizá
a veces
lo que queda de la poesía
En cuanto a lo que queda del poema o si de él queda, me
suele inquietar como de una palabra de mi muerte sabiendo que las palabras son indiferentes, la palabra y mi muerte. Sobresaltos del cuerpo y de la conciencia me inquietan, nada más. Si no me invade la ira como si me amenazara esa asfixia que los sistemas provocan con sus ortodoxias y sus anatemas. Sin duda eso es injusto, pero no hay nada que hacer. Yo he preferido a los místicos a los fervientes y el silencio a los dogmas. Y profiero pocas palabras y que inmediatamente tacho hasta que no quede nada o casi nada. Esta laceración que diré y este dolor es lo que queda de mi historia con la filosofía. Algunos fragmentos de cuadernos de Wittgenstein y la definición spinocista del bien como incremento del ser y del mal como disminución del ser,

es lo que queda
del poema
del poema sobre todo
como intento difícil y prudente de reconciliación
dudo de lo que se dice de y lo que se dice sobre
como intento de usar la palabra
que cesa de
y a esta cesación
a lo que queda una vez que cesa la tiranía de la palabra
le llamo poema

De todos modos lo que queda, quiero decir los que quedan
escuchando tu muerte en las palabras
que resta palabra a la palabra
y lo que queda cuando uno es de aquellos que quedan y
uno mismo lo que queda
es de tal suerte nada
ausencia de lengua en esta ausencia que es la lengua
agujero en un agujero
que
las palabras diciendo ese vacío y esta ausencia los colma
como
paletadas de tierra colmando la tumba
y las palabras que quedan abarrotan mi boca
como
la tierra abarrota la tuya

Lo que queda de ti
por ejemplo tus pies que se volvieron fríos
que uno no podía hacer entrar en tus zapatos
vuelvo a ver esos zapatos mal puestos
y eso me atormenta
de no haber podido poner tus zapatos mal puestos
como
si tuvieses que caminar
como
si caminaras
pero tus brazos y tus manos estaban calientes y
suaves incluso dos días después
y yo las puse
como
tú lo deseabas
esto es lo que queda en mi memoria
en la cual no queda nada

Lo que queda, a veces es demasiado
demasiado mudo y demasiado prolijo para una boca
no es silencio lo que queda es mutismo
y el cielo recorre el cielo
inmóvil

Lo que queda de los muertos
también es el menaje de los muertos
después de la solitaria muerte del padre hice la limpieza
trajes ropa blanca vajilla papeles objetos
uno clasifica arroja da coge ordena
esa limpieza de la muerte en seguida lo hice por los muertos familiares más lejanos: igual ropa blanca, trajes e incluso por una muy vieja muerta por sorpresa en pleno mes de julio de una crisis cardiaca y transportada dos días después por los bomberos, la limpieza de los primeros gusanos: grandes gusanos blancos que corrían sobre la baldosa
al emplazamiento del cuerpo
e igual ropa blanca, vajilla, muebles, papeles
y ahora la limpieza de lo tuyo
ésta inimaginable
y semejante lo que queda de ti y de toda tu, nuestra...
ropa blanca trajes papeles libros
un año entero ha durado
la limpieza de tu muerte
vaciando bolsa por bolsa
yo también vaciada
bolsa por bolsa
y ahora que haría falta vender la casa donde
han encallado esos restos de muertos y que yo vacío
todo es
como
si fuese necesario que me ocupe del menaje de mi
propia muerte

Poemas
también quedan de ti
y triunfante pienso: una vez hecha la limpieza
de los muertos, el poema es lo que queda a aquellos que
quedan
y clasifico fragmentos y vestigios de poemas
dentro de viejas carpetas arrugadas, los tuyos, los
míos
releo las borroneadas frases todavía legibles
--es para borrar, verdaderamente borrar toda huella y que no quede nada sino nuestras correcciones de un espesor negro y es también para que nada quede de lo que escribo
directamente en el ordenador, más tachaduras, más huellas
más nada, la muerte lisa, la ilusión de eternidad intacta
en fin nada—
mas aquello que queda, esos restos de textos no consumados
e incluso los realizados, esos residuos yo los reúno
como
recogiendo restos mortuorios
y lo que podría ser conmovedor, las huellas de aquello
que somos, o festivos, aquello de esos restos sobre
la mesa de los aniversarios o en las sábanas de
celebraciones íntimas, todo aquello sombrío con el resto
y lo que queda es la muerte

Lo que queda, quiero decir los que quedan
y yo que quedo para el inventario de lo que queda de ti
de nosotros, memoria morral prolífico incluso si
abarrotada de pájaros muertos
queda queda queda tanto como
como desear decir todo lo que queda saliendo de
mi boca brazadas de cintas de palomas
de liebres de tizones de pañuelos
en cantidad inimaginable
lo que queda de una vida es increíble
en la memoria esta inmensidad
y yo quisiera decir
toda esta inmensidad sustraída
debo decirla toda además no
la muerte convierte en una obscenidad las palabras
lo que queda no pertenece sino a mí que pertenezco
por mi parte a la muerte
y lo que queda de mi vida hoy en día es la muerte

Yo escucho a los que quedan
de los cuales formo parte
sin embargo eres tú que quedas hasta la fecha donde terminas
tu vida y sigues siendo definitivamente
cuando yo continúo avanzando hacia la muerte y
que me queda por recorrer la distancia desconocida
entre tu muerte y la mía
y tu muerte me hace vivir andando hacia atrás yendo a
encontrarte cuando tú sigues siendo donde yo continúo
y voy hacia la muerte para atrás
y lo que me queda de vida está entre dos muertos

Yo escucho a los que quedan
y no escucho más nada

Lo que queda de ti
no puedo imaginarlo
no imaginar tu rostro, tus ojos, tu boca sin
carne o tu carne pudriéndose o tus ojos
--tus ojos de una mirada intensa e inagotable—con
las pupilas reventadas por el gas de la fermentación
yo sé, puedo verlo incluso
pero no entiendo
no entiendo esas palabras
suenan sin sonar
no las comprendo
son palabras escritas con palabras imposibles

Entiendo lo que queda en lo que queda y en esa
labranza de gusanos que revuelve mis palabras entiendo
súbitamente versos
como
versos de cadáver
o bien leo despojos y la palabra falta
hasta
no ser más que un despojo sonoro y entiendo
des pojos o pi o jos o
hasta
que la lengua cae en pedazos
hasta
que no comprenda más lo que hablo
como
en esa dificultad que tengo para decir “tú no estás”
unoestámuertoovivocasaesaúnal-
gonoestarmásesnoestarmueroesestarmuer-
to ynoestarmásvivosímassiestarmuertoesnoestar-
másnadaentoncesnoestarmásnoquieredecirnadaymásnada-
noquieredecirnadaysobretodonoquerery
y así durante horas
y ese zumbido bajo las palabras que las pulverizan
es también tu muerte

Pero para ti
muerto estás más solitario que yo aquí con
ni siquiera como yo llantos y pesadumbre
con nada
o entonces ¿dónde y con qué tu?
este día de primavera lluviosa a la vera del Bosque
de Boulogne con los pájaros y las flores malvas
de tréboles
recuerdas esa diéresis sobre Bïenvenida a
Montparnasse que se aisló de la palabra entera
acogiéndonos
y de mis tréboles de cuatro hojas que llamabas hierba
para conejos
esos tréboles en envoltura con scotch te los
doy
en el caso que se convierta moneda de nuestra alma
como
se desliza entre mis dedos esta pequeña moneda
de una felicidad muerta
para ti
a quien no le queda nada estando muerto
incluso sin saber ni sentir nada de la muerte
o entonces pero este entonces es enorme para un
tejido de alma raído por la pena
por ti porque sin ojos te ofrezco lo que mis
ojos ven bajo la fina lluvia que limpia el hori-
zonte esta casa sobre las alturas del puerto pa-
recida a aquella que habríamos habitado
como
una palabra o un gesto amoroso
como
habríamos mirado juntos ese cielo azul claro
del sur sobre la mar gris
y los habríamos encontrado bellos
sin más
y el aire fresco que hace ligeramente tiritar los
hombros
en el olor de los eucaliptos y el yodo
prueba no hay
pero a la piel no le hace falta
ni las nubes en el amarillo del alba
de la mar separada
no queda sino una línea al borde bombeada del cielo
de ti hacia mí
esta línea que va a zozobrar

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